La journée d’actions des fonctionnaires demain, première du quinquennat, ne la « choque pas » et ne la « surprend pas. » Mieux, elle « comprend l’impatience des agents » dont « la situation est difficile » après déjà trois ans de gel du point d’indice. Mais la raison l’emporte toujours sur la compassion car « nul ne peut ignorer les contraintes budgétaires. » A l’occasion de ses voeux à la presse, hier, Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique, a soigné la forme pour mieux rester ferme sur le fond : il n’y aura pas, a-t-elle redit, d’augmentation générale en 2013. « Attention, on est sur le même bateau et si l’action publique était abîmée par des déficits trop forts, que nous perdions une part de souveraineté, vous seriez aussi en difficulté », a-t-elle prévenu les fonctionnaires. Alors que les discussions salariales qui s’ouvriront le 7 février porteront aussi sur 2014 et 2015, la ministre a laissé entendre que la modération budgétaire y resterait de mise. Selon nos informations, des petits gestes, de l’ordre d’une hausse de 0,5 % du point d’indice, seront toutefois envisagés en cas de reprise, même légère, de la croissance.
Pas question non plus de revenir sur les suppressions de postes dans les ministères non prioritaires, autre mot d’ordre de la journée d’action de demain : « C’est la contrepartie aux efforts faits dans l’Education et la Justice, érigés en priorité par François Hollande. C’est clair depuis le début, personne ne peut le nier. »
A défaut de pouvoir dégeler de suite le point d’indice, le ministère est toutefois résolu à s’attaquer à un autre marqueur du quinquennat Sarkozy : la rémunération à la performance des fonctionnaires. « Je vais revenir dessus », confie Marylise Lebranchu aux « Echos », pour qui ce dispositif n’est « pas adapté à la fonction publique » et a constitué « un tract politique » sous la précédente majorité.
L’idée directrice est de revenir sur la prime de fonctions et de résultats (PFR), lancée en 2009 pour les cadres dirigeants et progressivement étendue depuis à d’autres agents de catégorie A (la plus élevée) et même quelques postes en catégorie B. Début 2012 (dernières données disponibles), elle concernait 55.000 agents, pour un coût d’environ 400 millions d’euros. A terme, le précédent gouvernement prévoyait de l’appliquer à quelque 200.000 agents. Les syndicats sont favorables à une refonte de ce dispositif, dont ils combattent depuis le début la philosophie, y voyant, comme Marylise Lebranchu, le corollaire d’une politique du chiffre incompatible avec les valeurs du service public.
Le chantier n’en est qu’à ses débuts mais l’idée directrice est de limiter les primes liées à des objectifs chiffrés aux seules cadres à forte responsabilité. Pour les autres agents, « il est absurde de vouloir lier la rémunération à des résultats individuels que personne ne peut vraiment mesurer », explique l’entourage de la ministre. Qu’ils se rassurent, leur prime ne devrait pas disparaître mais être désormais plus liée à la fonction occupée -et de la sorte devenir du fixe qui ne dit pas son nom… et coûte bien moins cher à l’Etat que des revalorisations indiciaires, soumises à de plus lourdes charges. Une part liée au mérite individuel demeurerait, mais serait « non plus lié à la performance mais à des critères comportementaux », mettant plus en avant la notion de collectif de travail. Ce chantier s’inscrira dans celui, plus vaste, d’harmonisation des primes, dont la part dans la rémunération totale des agents est passé de 10 à 20 % ces 20 dernières années et qui donnent lieu à des politiques très diverses d’un ministère à l’autre. Dans cette même logique de revaloriser le travail d’équipe, le ministère exclut a priori de supprimer l’intéressement collectif des fonctionnaires, timidement lancé en 2012 par la précédente majorité, mais ne s’interdit pas de refondre le dispositif.