Ou l’allégorie des chiroptères…
Lu sur
http://lecteurs.blogs.sudouest.fr
Voici quelques années j’ai lu un article
scientifique sur les mœurs des chauves-souris.
Un chercheur racontait l’anecdote suivante :
Ayant attrapé quelques chauves-souris dans un
piège, il leur mit une bague à chacune, autour
d’une patte. Pour après, s’il réussissait
à les retrouver, essayer de comprendre leurs
déplacements dans les parages.
Revenu sur les lieux, quelques jours après, il retrouva une
des chauves-souris morte. La pauvre bête s’était
sectionné une patte, avec ses propres dents, pour… pouvoir
se libérer !
Intrigué par un tel acharnement, cherchant à
comprendre la raison d’un tel acte, le chercheur eu l’idée
de peser le petit chiroptère et la bague. Le poids de cette
dernière représentait quasiment la
moitié du poids de l’animal ! D’où sa fatale
tentative…
Une professeur s’est immolée par le feu, dans un
lycée de Béziers. Une dame de soixante-dix sept
ans s’est immolée par le feu, quelque part en France. Cinq
agents de l’Office National des Forêts se sont
suicidés, depuis le mois de juillet dernier. De combien de
suicides ne nous a-t-on pas parlé, à la radio,
à la « télé », dans les journaux ?
Combien ont eu lieu, sans que nous le sachions ? Combien de meurtres
violents, d’agressions idem ?
Et que nous dit-on ? "Un forcené…, il/elle
était dépressif/ive, fragile
psychologiquement…". Point !
Qui se donne la peine de comprendre ces gestes
désespérés ? Surtout pas les
médias. Encore moins les hommes, et femmes, politiques. Nous
? Détournons vite le regard de ces gestes inconvenants,
malséants. Suivons gentiment notre pauvre routine,
hâtons-nous vers les prochaines soldes ! Vite, signons la
pétition du jour sur Internet pour nous sentir dans la peau
du Ché et une bonne conscience !
Mais il se peut qu’un jour, nous aussi, comme eux, comme la
chauve-souris, nous nous coupions une patte, pour nous
libérer de ce poids qui nous empêche de voler.
Ce poids qui n’est que l’âpre lutte au quotidien pour une
survie matérielle et insensée. Car la vie sans
idéal n’est que survie animale.
Mais nous aussi, un jour, peut être
réaliserons-nous que nous avons, comme l’Albatros, "des
ailes de géant qui nous empêchent de marcher".
Ces ailes ce sont notre âme, nos idéaux. Que nous
avons voulu reléguer au magasin des accessoires, pour ne pas
qu’ils nous empêchent de marcher parmi les autres, nos
frères, nos semblables… Que nous ne pouvons pas nous
empêcher d’aimer, sans pouvoir nous l’avouer. Esprits
grégaires que nous sommes.
Alors, il se peut qu’un jour, nous devions choisir : se
libérer du poids, couper les ailes, ou se
révolter.
Ce jour là, si nous nous sentons seuls, nous couperons la
patte, avec nos propres dents, comme eux. Ou bien nous nous couperons
les ailes et renoncerons ainsi à notre humanité.
Ce jour là, si nous nous sentons humain parmi les humains,
nous nous unirons et nous battrons pour ne plus que l’on nous mette des
bagues.
Et nous pourrons alors marcher et voler…
Manuel Martinez, Biarritz (64)