Bras de fer entre un syndicat et Bercy sur la vente de l’Hippodrome de Compiègne

Jeudi 21 juin 2012

Lu sous http://www.liberation.fr/

Vue aérienne de l’Hippodrome de Compiègne en mars 2009 (AFP)

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La vente controversée de l’Hippodrome de Compiègne (Oise), validée par l’ex-ministre du Budget Eric Woerth, reste au cœur d’un bras de fer entre Bercy et un syndicat, qui menace de saisir la justice administrative pour en obtenir l’annulation.

Le Snupfen (Syndicat national unifié des personnels des forêts et de l’espace naturel) a formé le 19 avril un recours gracieux auprès du ministère du Budget pour lui demander d’annuler la cession de gré à gré à la Société des courses de Compiègne (SCC) en 2010 des parcelles où se trouve l’hippodrome.

Faute de réponse positive du ministère sous deux mois - soit mardi - le syndicat pourra dans les deux mois qui suivent se tourner vers la justice administrative, devant laquelle se contestent les décisions de l’Etat.

"Si Bercy ne fait pas droit au recours gracieux, la juridiction administrative sera saisie", ont affirmé à l’AFP Me Edmond-Claude Frety et Frédéric Mengès, les avocats du Snupfen.

Cette action est distincte des enquêtes judiciaires en cours. L’une d’elles, ouverte pour "prise illégale d’intérêt" par la Cour de justice de la République (CJR) s’intéresse spécifiquement au rôle du député-maire UMP de Chantilly, Eric Woerth, qui avait validé la vente par un arrêté du 16 mars 2010, alors qu’il était ministre du Budget.

« Lecture très complaisante »

"Il appartient à la CJR et aux juges du pôle financier de caractériser la commission d’infractions pénales dans ce dossier", expliquent Mes Frety et Mengès. "Quelle que soit l’issue de ces instructions, le recours du Snupfen se positionne aujourd’hui sur le pur problème du respect du droit forestier et des règles protectrices du domaine de l’Etat", poursuivent-ils.

"Il nous paraît d’ores et déjà suffisamment établi que ces règles au pire n’ont pas été respectées, au mieux ont fait l’objet d’une lecture très complaisante", ajoutent-ils.

La forêt de Compiègne relevant, selon le Snupfen, du domaine public, il aurait fallu une loi de déclassement des parcelles pour permettre leur vente.

Et même si la justice considérait que les parcelles relevaient du domaine privé de l’Etat, la cession n’a pas respecté le Code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP), qui prévoit l’adoption d’une loi préalable à l’aliénation des bois et forêts, estime le syndicat. Et les conditions ne sont pas réunies pour une dérogation autorisant la vente par décret, selon le Snupfen.

Plainte de sept députés socialistes

Au-delà, les deux avocats dénoncent l’absence de mise en concurrence, le prix dérisoire ou encore le non respect du droit de priorité sur la vente du conseil de la communauté de communes de Compiègne.

"Le respect du domaine privé ou public de l’Etat, est une question qui regarde l’ensemble des Français et donc la représentation nationale", expliquent Mes Frety et Mengès. "Son aliénation est soumise à des règles strictes qui supposaient son autorisation. Ici, on s’en est dispensé."

Partie civile dans l’enquête sur le volet non ministériel de la vente, le Snupfen a choisi une date stratégique pour son recours. Le délai de deux mois englobe les scrutins, l’alternance et s’achève deux jours après le renouvellement d’une Assemblée nationale qui n’aura pas eu son mot à dire sur la vente.

Ce recours n’a reçu aucune réponse de l’ex-ministre UMP du Budget Valérie Pécresse, ont indiqué Mes Mengès et Frety, sans nouvelles du nouveau ministre, le socialiste Jérôme Cahuzac. Interrogé par l’AFP, le ministère n’a pas souhaité faire de commentaire dans l’immédiat.

L’enquête sur la vente de l’hippodrome avait été ouverte en décembre 2010 à la suite d’une plainte de sept députés socialistes.

Dans un rapport au Sénat en 2011, la socialiste Nicole Bricq, aujourd’hui ministre de l’Ecologie, avait estimé que la procédure de cession avait été « bricolée » et posait "de nombreuses questions de droit administratif".

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