Le mal-être des forestiers cache celui de la forêt

Mercredi 6 juin 2012

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Ils sont 13 forestiers en Loir-et-Cher, à effectuer un travail de plus en plus difficile. Le Snupfen se fait l’écho de leurs inquiétudes pour la forêt de demain.

Le travail de forestier perd en proximité. Il n'y a qu'un seul technicien forestier de l'ONF pour la Sologne. - (Photo archives NR)
Le travail de forestier perd en proximité. Il n’y a qu’un seul technicien forestier de l’ONF pour la Sologne. - (Photo archives NR)

Le mal-être des forestiers cache celui de la forêt

Ce n’est pas un sacerdoce, mais presque. Être forestier à l’ONF (office national des forêts), c’est défendre des valeurs environnementales et éthiques, vivre en communion avec la forêt. « Il y a un malaise très fort chez les forestiers. Ils sont sans cesse écartelés entre la bonne gestion pour préserver de la forêt, et les objectifs qu’on leur impose, explique Yvon Marsaud, secrétaire régional du Snupfen solidaires, syndicat majoritaire. Ce mal-être est allé dans plusieurs cas (pas en région Centre) jusqu’au suicide en forêt, avec l’arme de service. »

La première cause en est la réduction du nombre de postes qui a démarré après la tempête de 1999. Et qui s’est doublée du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux à son départ en retraite. Ce qui vient de ramener le niveau de l’effectif national à celui de sa création en 1964. « Le nombre de forestiers sur le terrain s’est considérablement réduit. Nous avons tous un penchant pour la solitude, mais là nous sommes isolés de nos collègues, avec des territoires très importants, des charges multiples qui ne nous permettent plus d’exercer correctement nos missions de service public et nos pouvoirs de police pour faire respecter la forêt. »
Le syndicat dénonce l’organisation en directions territoriales titanesques, comme celle d’Orléans qui s’étend de Brest au Puy-en-Velay, avec des massifs océaniques, montagnards ou ligériens aux problématiques multiples. Et la spécialisation des tâches comme les travaux forestiers ou la commercialisation  : « Avant le forestier avait une vision globale de ses surfaces, il était polyvalent. Désormais il ne fait que signaler et d’autres font à sa place. »
Le second facteur qui a semé ce trouble, c’est la perte de valeur du travail forestier. La vente du bois couvrait deux fois les salaires des forestiers il y a 30 ans (65 € le m3 à prix constants). Aujourd’hui la moitié des salaires est à peine remboursée (29 € le m3). « La forêt ligérienne de chênes a été largement prélevée. On nous demande de couper de plus en plus tôt pour alimenter la filière bois car la forêt privée ne joue pas le jeu, ainsi que pour nous payer. Une forêt en Loir-et-Cher se conduit sur 200 ans, des objectifs sur 3 à 5 ans c’est aux antipodes de la préservation  ! »

" Quelle forêt voulons-nous transmettre à nos enfants  ? "

Le Snupfen craint le retour à une exploitation des résineux rapides en pousse, donc rentables. « Quelle forêt voulons-nous transmettre à nos enfants, c’est ça le véritable enjeu  ! » Et qui pour la préserver. Le 19 juin, l’intersyndicale de l’ONF organise une journée d’action nationale. Pour faire entendre sa voix et ses craintes. Et espérer rencontrer un écho, peut-être en finançant une politique ambitieuse grâce aux écotaxes.


Béatrice Bossard

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