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Ils sont 13 forestiers en Loir-et-Cher, à effectuer un travail de plus en plus difficile. Le Snupfen se fait l’écho de leurs inquiétudes pour la forêt de demain.
Le travail de forestier
perd en proximité. Il n’y a qu’un seul technicien forestier
de l’ONF pour la Sologne. - (Photo archives NR)
Le mal-être des forestiers cache celui de la forêt
Ce n’est pas un sacerdoce, mais presque. Être forestier à l’ONF (office national des forêts), c’est défendre des valeurs environnementales et éthiques, vivre en communion avec la forêt. « Il y a un malaise très fort chez les forestiers. Ils sont sans cesse écartelés entre la bonne gestion pour préserver de la forêt, et les objectifs qu’on leur impose, explique Yvon Marsaud, secrétaire régional du Snupfen solidaires, syndicat majoritaire. Ce mal-être est allé dans plusieurs cas (pas en région Centre) jusqu’au suicide en forêt, avec l’arme de service. »
La première cause en est la réduction du
nombre de postes qui a démarré après
la tempête de 1999. Et qui s’est doublée du
non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux à son
départ en retraite. Ce qui vient de ramener le niveau de
l’effectif national à celui de sa création en
1964. « Le nombre de forestiers sur le
terrain s’est considérablement réduit. Nous avons
tous un penchant pour la solitude, mais là nous sommes
isolés de nos collègues, avec des territoires
très importants, des charges multiples qui ne nous
permettent plus d’exercer correctement nos missions de service public
et nos pouvoirs de police pour faire respecter la
forêt. »
Le syndicat dénonce l’organisation en directions
territoriales titanesques, comme celle d’Orléans qui
s’étend de Brest au Puy-en-Velay, avec des massifs
océaniques, montagnards ou ligériens aux
problématiques multiples. Et la spécialisation
des tâches comme les travaux forestiers ou la
commercialisation : « Avant le
forestier avait une vision globale de ses surfaces, il était
polyvalent. Désormais il ne fait que signaler et d’autres
font à sa place. »
Le second facteur qui a semé ce trouble, c’est la perte de
valeur du travail forestier. La vente du bois couvrait deux fois les
salaires des forestiers il y a 30 ans
(65 € le m3 à
prix constants). Aujourd’hui la moitié des salaires est
à peine remboursée (29 € le m3).
« La forêt ligérienne
de chênes a été largement
prélevée. On nous demande de couper de plus en
plus tôt pour alimenter la filière bois car la
forêt privée ne joue pas le jeu, ainsi que pour
nous payer. Une forêt en Loir-et-Cher se conduit sur
200 ans, des objectifs sur 3 à
5 ans c’est aux antipodes de la
préservation ! »
" Quelle forêt voulons-nous transmettre à nos enfants ? "
Le Snupfen craint le retour à une exploitation des résineux rapides en pousse, donc rentables. « Quelle forêt voulons-nous transmettre à nos enfants, c’est ça le véritable enjeu ! » Et qui pour la préserver. Le 19 juin, l’intersyndicale de l’ONF organise une journée d’action nationale. Pour faire entendre sa voix et ses craintes. Et espérer rencontrer un écho, peut-être en finançant une politique ambitieuse grâce aux écotaxes.
Béatrice Bossard